Depuis quelques jours, une tombe située dans un cimetière du Var fait polémique. En cause, sa couleur rose bon­bon. C’est celle de Léa, trois ans, décédée le 26 août 2015 de graves patholo­gies car­diaques. Le mon­u­ment funéraire a été van­dal­isé plusieurs fois. Des habi­tants auraient demandé à la mairie de chang­er la couleur, esti­mant qu’elle « nuit à la sobriété des lieux ». Cette demande est-elle légitime ? Peut-on faire ce que l’on veut pour les tombes de ses proches ?

Oui, le rose, c’est pos­si­ble

On les con­nait tous, ces cimetières grisâtres, aux longues avenues plus ou moins feuil­lues, où s’alig­nent des tombes et des caveaux vieil­lis par le temps. Des « ci-gît » clas­siques et com­muns, une impres­sion de déjà vu devant chaque pierre tombale. Pour­tant, ce n’est pas la loi qui impose cette uni­for­mité. Comme le notait un rap­port séna­to­r­i­al pub­lié en 2006, « les par­ti­c­uliers jouis­sent d’une grande lib­erté », sous réserve de ne pas con­trevenir aux règles d’hygiène, de sécu­rité et de décence.

Si les mairies ont un pou­voir de régle­men­ta­tion pour fix­er la dimen­sion des tombes, la forme et les couleurs, eux, relèvent du domaine privé. Il y a donc très peu de règles à respecter et cha­cun a une grande lib­erté dans le choix d’un mon­u­ment funéraire : de couleur vive, en hau­teur, alam­biqué ou sim­ple et clas­sique. Tout est pos­si­ble, à con­di­tion rester dans les lim­ites du ter­rain con­cédé par le con­ces­sion­naire. Il suf­fit de se balad­er dans les avenues du cimetière du Père-Lachaise pour admir­er cer­taines tombes qui sor­tent de l’or­di­naire. Celle d’Oscar Wilde, par exem­ple, est signée par le sculp­teur expres­sion­niste Jacob Epstein. Une tombe se trans­for­mant presque en oeu­vre d’art : on peut admir­er la sépul­ture, elle même sur­mon­tée d’un sphinx ailé nu.

tombe

Ce qui n’est pas permis

En matière d’épi­taphe, la lib­erté dont dis­pose le futur défunt ou sa famille est assez grande, mais tout n’est pas per­mis là non plus. Le maire de la com­mune con­cernée peut oppos­er un refus s’il con­sid­ère que le con­tenu est de nature à trou­bler l’ordre pub­lic. L’ar­ti­cle L.2542–13 du Code général des col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales pré­cise que « les autorités locales sont spé­ciale­ment chargées (…) d’empêcher qu’il ne se com­mette dans les lieux de sépul­ture aucun désor­dre, ou qu’on s’y per­me­tte aucun acte con­traire au respect dû à la mémoire des morts ». L’in­scrip­tion ne doit donc pas tomber dans la provo­ca­tion ou l’ap­pel à la haine. Et lorsqu’il s’ag­it d’une langue étrangère, il faut y join­dre une tra­duc­tion en français.

Et pour ceux qui souhait­ent aller plus loin dans la per­son­nal­i­sa­tion des tombes sans expos­er leur mes­sage directe­ment au pas­sant, il existe désor­mais une épi­taphe 2.0. Cha­cun peut partager le sou­venir d’un être cher dis­paru et en con­serv­er la mémoire en instal­lant sur une pierre tombale une plaque com­por­tant un QR code. Une fois flashé, ce code barre per­met d’accéder à des pages du sou­venir con­sacrées au défunt à par­tir d’un smart­phone, d’une tablette dig­i­tale ou d’un ordi­na­teur. Une manière de pro­longer le sou­venir de ses proches sans que les pho­tos jau­nis­sent dans un album rarement regardé ou ne se flétris­sent dans les allées du cimetière.

Crédit pho­to : Marc Maréchal CC BY SA