Aucune élec­tion ne pointe à l’horizon. Pas de can­di­dat atten­du sur l’estrade, ni même de par­ti représen­té. Ce same­di 11 mars après-midi, tout fleure pour­tant le rassem­ble­ment mil­i­tant. Dans la salle en sous-sol de Seekube, une start-up du très branché 11e arrondisse­ment, trois cents étu­di­ants et jeunes act­ifs sont venus à l’appel du col­lec­tif “les Jeunes avec Macron” (JAM) pour le lance­ment de leur nou­veau think tank, la Gauche libre.

Leur cham­pi­on ne vien­dra pas. Qu’im­porte, même absent, le min­istre est de toutes les con­ver­sa­tions. « La per­son­nal­ité d’Emmanuel Macron est atyp­ique, elle casse les codes, explique Pierre Per­son, co-fon­da­teur du fan club du min­istre. C’est pour cette rai­son qu’on attire beau­coup plus de gens issus de la société civile que des pros de la poli­tique. »

L’assistance a écouté religieuse­ment le député PS Pas­cal Ter­rasse et l’économiste Jean-Marc Daniel dis­courir sur l’avenir de la France. Pas de dra­peaux, ni de slo­gan. Juste une curiosité tein­tée de timid­ité chez ces jeunes sup­port­ers n’ayant, pour la plu­part, jamais passé la porte d’un par­ti poli­tique : « 60 % des gens ici n’ont jamais adhéré où que ce soit. Ils ne se sen­tent pas représen­tés par l’offre poli­tique actuelle », jus­ti­fie Pierre Person.

 

Sur les entre­pre­neurs, les 35 heures ou les fonc­tion­naires, les sor­ties fra­cas­santes du min­istre de l’Economie crispent chaque jour un peu plus les dirigeants de la rue de Solféri­no. Elles séduisent tout autant cette jeune frange de l’électorat, réfrac­taire aux logiques de par­ti. « Emmanuel Macron est intéres­sant parce qu’il a l’avantage de faire par­tie du sys­tème tout en sachant s’en détach­er pour rester indépen­dant et nova­teur », témoigne Vic­toire, étu­di­ante de 23 ans. « S’il était encar­té dans un par­ti il n’aurait pas cette lib­erté d’agir, con­tin­ue Lau­ra, 25 ans, étu­di­ante en école de com­merce. On le voit claire­ment avec son action au gou­verne­ment, il n’a pas peur de dire ce qu’il pense. »

Pour ces jeunes “apartides”, il y a quelque chose de ras­sur­ant dans le par­cours de leur cham­pi­on, qui n’a pas renou­velé sa carte du PS depuis 2009. La preuve qu’en poli­tique, les par­tis n’ont pas seuls la main : « Je ne me suis jamais engagé dans un par­ti parce que je préfère les idées aux réflex­es de clan, claironne Flo­ri­an, ingénieur financier de 24 ans. On a pas besoin d’avoir une carte pour faire avancer les choses, Macron en est la preuve. »

 

Bien que passé par le Mou­ve­ment des jeunes social­istes (MJS) ou l’Unef, les qua­tre fon­da­teurs du col­lec­tif parta­gent ce même scep­ti­cisme vis-à-vis du par­ti de leurs aînés : « Si nous avons créé les Jeunes avec Macron et la Gauche libre hors du cadre par­ti­san, c’est pour dire qu’on en a assez, gronde Pierre Per­son. Les par­tis poli­tiques ne ser­vent plus l’intérêt général comme ils ont pu le faire par le passé. Toute l’action qu’on est en train de men­er a pour but de rap­procher la poli­tique du citoyen. »

Une démarche qu’Emmanuel Macron a tenu à saluer per­son­nelle­ment, en invi­tant les qua­tre com­pères lun­di dernier dans ses bureaux de Bercy : « Il nous a dit : “Amusez-vous !” Il a beau­coup insisté pour que l’on reste hors des par­tis, des struc­tures tra­di­tion­nelles, et surtout d’aller à la ren­con­tre des jeunes et de la société civile », rap­porte à l’Opinion Pierre Texier.

 

Le col­lec­tif, qui revendique 3 500 mem­bres, veut désor­mais s’implanter en région, rejet des par­tis tra­di­tion­nels en ban­doulière. « Ce que l’on souhaite, c’est que les idées d’Emmanuel Macron per­durent dans le débat pub­lic, assure Pierre Per­son. On sera très déçus si le can­di­dat de gauche ne les porte pas en 2017. » Quitte à ce que ce soit par l’homme de par­ti par excel­lence : François Hollande.