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A l’origine de ces campagnes, des citoyens réunis par une même volonté : celle d’agir sur l’action politique. Grâce à des plateformes comme Change.org, les résultats sont parfois réels. « Les gens se mobilisent de plus en plus, ils ont davantage envie de se faire entendre, explique Sarah Durieux, directrice adjointe de la branche Change.org en France. Il y a une défiance envers les structures traditionnelles, du type syndicats et partis politiques ». Sur ces plateformes, « pas de place pour l’idéologie : les individus se manifestent pour des causes spécifiques et concrètes, au-delà des clivages partisans ». Une affirmation qui reste tout de même à nuancer. Sur le site, les pétitions sur des projets de loi ou des démissions de ministres tiennent le haut du pavé.
Comment mesure-t-on la réussite d’une pétition ou, à l’inverse, son échec ? Principalement par l’impact qu’elle a sur l’action publique. Récemment, deux pétitions ont marqué l’actualité. En décembre, Karine Plassard, militante d’Osez le féminisme, s’adresse à François Hollande pour demander la grâce présidentielle de Jacqueline Sauvage, cette femme condamnée à la prison pour avoir tué son mari violent. En quelques semaines, la pétition enregistre près de 400 000 signatures. Le 31 janvier, François Hollande accorde une grâce présidentielle partielle à Mme Sauvage.
le nombre de pétitions en ligne publiées chaque mois sur le site Change.org
Mi-février, la ministre du Travail, Myriam El-Khomri, présente l’avant projet de loi sur le travail. La féministe Caroline de Haas proteste en ligne. Intitulée “Loi travail, non, merci!”, la pétition connaît un vif succès et devient l’une des rares en ligne à dépasser le million de signatures. Puis le virtuel passe à la réalité : lors de la manifestation du mercredi 9 mars, ils étaient 224 000 à se réunir dans l’ensemble de la France, selon la préfecture de police et le ministère de l’Intérieur.
« Cela dit, ce n’est pas le nombre de signatures qui fait le succès d’une requête, tempère Sarah Durieux. Chaque jour, cinq ou six pétitions avec seulement 100 ou 200 signatures arrivent à des changements comme celles des parents d’élèves qui luttent contre la fermeture d’une école en campagne. » Ce qui compte, c’est l’échelle géographique. En février 2013, un collectif lance la pétition “Non à la subvention de 400 000 euros pour le concert de David #Guetta à #Marseille”. Elle est signée par 70 000 personnes, dont 40 000 Marseillais. Face à l’ampleur de la polémique, David Guetta annule son concert. La pression citoyenne par la pétition, nouvel outil politique.
D’autres éléments entrent en compte dans le succès de ces opérations. « Le thème de la pétition, s’il concerne beaucoup de gens ; la formulation, car il faut que le texte soit facile à appréhender, comme une histoire à lire, rappelle Sarah Durieux. Il faut pouvoir comprendre les raisons, que ce soit visuel comme un contenu web. Enfin, il faut que la viralité de la pétition soit organisée sur les réseaux sociaux pour plus de visibilité. » Par exemple, les requêtes de défense des animaux fédèrent toujours beaucoup de signatures, la communauté concernée étant très organisée et très offensive sur les réseaux.
Etre célèbre ou appartenir à un collectif, syndicat ou parti politique, n’est pas forcément gage du succès de la pétition. « C’est sûr, la renommée et le réseau de Caroline de Haas ont été pour beaucoup dans le succès de sa pétition contre la loi sur le travail, reconnaît Sarah Durieux. Mais on a aussi des héros ordinaires, qui réussissent à se faire entendre et à se créer une légitimité. Prenez Mélanie Doerflinger, qui a lancé la pétition sur la composition des tampons. Il y a eu plus de 200 000 signatures alors qu’elle n’est pas forcément connectée, qu’elle n’appartient à aucune association ou parti. »
Cette étudiante en histoire de 20 ans ne s’est pas contentée que les signatures s’accumulent. Elle a envoyé une dizaine de courriers en recommandé à différentes institutions politiques. Une persévérance qui paie. Elle révèle fin février au Huffington Post qu’elle sera reçue le 10 mars au ministère de la Santé. Son ambition ? Qu’une législation au niveau européen soit adoptée pour garantir la transparence de la composition des tampons.
Toute revendication a le potentiel pour atteindre son but. Sur Change.org, une pétition en ligne trouve un large écho toutes les heures dans le monde. Depuis que vous avez commencé la lecture de cet article, une pétition sur le point de changer la face du monde a peut-être été mise en ligne.